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lundi 10 mars 2014

L’agriculture en tant que moteur de la croissance pour lutter contre la pauvreté : potentialités et contraintes de l’agriculture de conservation pour lutter contre la pauvreté rurale en Afrique


L’agriculture en tant que moteur de la croissance pour lutter contre la pauvreté : potentialités et contraintes de l’agriculture de conservation pour lutter contre la pauvreté rurale en Afrique 

L’accent est mis sur  la  réduction  de  la  pauvreté  grâce  à  l’agriculture  dans  les  pays  en développement.  Je me suis penché sur la question d’une manière globale en tenant compte à la fois des besoins et des acteurs, et en examinant le potentiel des partenaires au développement à contribuer au développement de l’agriculture en faveur des pauvres. Il faudrait combler le fossé entre les décideurs administratifs et  les  professionnels  de  différents  horizons,  et  d’utiliser  à  la  fois  une  expérience  pratique  et  des  modèles théoriques pour servir de base. Quatre sessions thèmes doivent être étudié avec soin: 
  1.  l’agriculture et de la croissance pro-pauvres: défis et opportunités, 
  2. des politiques agricoles en faveur de la croissance pro-pauvres, 
  3.  la recherche agricole, la vulgarisation et l’innovation, 
  4. comment faire bouger l’agriculture et l’entreprenariat rural. 

L’agriculture africaine est confrontée à de nombreux défis liés aux particularités du milieu dans lequel elle est pratiquée. Le climat se caractérise pour une bonne partie du continent par une insuffisance de la pluviosité annuelle totale et par une irrégularité de plus en plus marquée des pluies, ces deux phénomènes ont tendance à  être  amplifiés  par  le  réchauffement  climatique  global  que  connaît  notre  planète.  Les  sols africains  sont globalement plus pauvres en éléments nutritifs et plus acides que ceux des régions tempérées. Une bonne partie de ces sols présente en outre de gros problèmes d’instabilité structurale. De plus, les ennemis des plantes et des animaux n’y sont pas moins dommageables qu’ici, bien au contraire. Les agriculteurs africains travaillent dans cet environnement naturel difficile en disposant de moyens de production nettement moins importants que ceux des pays industrialisés. Le niveau de mécanisation des opérations culturales et celui de l’emploi des intrants sont très bas. L’accès à l’énergie qui est indispensable pour augmenter la productivité de la force de travail des agriculteurs ainsi que la valeur ajoutée des productions qu’ils réalisent est le plus souvent insuffisant. De plus, les prix offerts pour les denrées produites sont généralement trop peu rémunérateurs. L’ensemble de ces contraintes se traduit par la prédominance d’une logique d’autosubsistance chez beaucoup d’agriculteurs et par le recours à des techniques de production peu performantes et non durables qui se traduisent par une dégradation dramatique du potentiel de production du milieu qu’il faut absolument arrêter sous peine d’hypothéquer définitivement les perspectives d’amélioration des conditions de vie des générations futures.
Le  concept  de  révolution  doublement  verte  s’impose  de  plus  en  plus  à  travers  le  monde  pour  désigner  un mode de production qui est à la fois plus efficace et beaucoup plus économe en énergie que les techniques de production issues de la 1re révolution verte pour lesquelles l’obtention de hauts rendements dépend de l’emploi de grandes quantités d’engrais chimiques et de produits phytosanitaires.
La mise en œuvre de cette nouvelle révolution agricole en Afrique subsaharienne repose sur: (i) une exploitation plus rationnelle et plus efficace de la diversité génétique grâce à la domestication de nouvelles espèces et à la création par l’amélioration génétique classique et la transgénèse de plantes cultivées capables d’exploiter plus efficacement l’eau, l’énergie solaire et les éléments nutritifs du sol et de mieux résister à leurs ennemis naturels.
(ii) La mise en œuvre de techniques de production agro-écologiques relevant de l’agriculture de conservation qui n’aboutissent pas à une dégradation du potentiel productif des terres agricoles, mais au contraire à une augmentation durable de celui-ci et à un meilleur contrôle des ennemis des cultures. Certains agro-carburants de 1regénération comme le jatropha et les agrocarburants de 2egénération basés sur l’exploitation de la biomasse par des microorganismes peuvent constituer une opportunité pour améliorer les revenus et favoriser l’accès à l’énergie des agriculteurs les plus pauvres si les filières de production et de commercialisation sont organisées de manière à ce qu’ils puissent vraiment en tirer bénéfice. Pour améliorer les rendements tout en protégeant et en améliorant le potentiel productif des terres agricoles, l’agriculture de conservation repose sur l’application de trois grands principes: (i) l’absence ou la réduction au minimum du travail du sol, (ii) le maintien d’une couverture permanente du sol constituée de matière organique et  (iii)  la  mise  en  œuvre  de  rotations  adaptées  impliquant  souvent  des  plantes  de  couverture  qui  servent  à produire la biomasse nécessaire à protéger le sol et à enrichir son horizon supérieur en éléments nutritifs.Les principaux bénéfices apportés par l’agriculture de conservation sont: (i) La suppression de l’érosion, tant hydrique qu’éolienne, (ii) l’amélioration de la fertilité du sol tant au niveau de sa structure que de sa capacité à retenir et à libérer de grandes quantités d’élément nutritifs, ce qui augmente l’efficience des engrais minéraux qui  lui  sont  apportés,  (iii)  la  limitation  de  l’impact  des  adventices,  (iv)  la  lutte  contre  les  effets  néfastes  du réchauffement climatique grâce à une augmentation de la résilience des systèmes de production agricole vis-à-vis de l’augmentation de l’irrégularité des pluies et de la baisse globale de la pluviosité et (v) la lutte contre une des causes majeures du réchauffement global grâce à la fixation dans le sol d’importantes quantités de carbone par ha. A ce point de vue, des recherches menées au Brésil, au Gabon et à Madagascar ont montré que l’augmentation de la teneur en carbone du sol au cours des premières années qui suivent l’adoption des techniques de semis direct sans labour dans un couvert végétal permanent s’élevait à 2 à 3 tonnes de carbone par ha et par an, contre une perte de carbone pouvant aller jusqu’à près de 1.500 kg par ha pour certains systèmes de culture avec labour à la charrue à disque.Selon  les  dernières  statistiques  de  la  FAO,  l’agriculture  de  conservation  concerne  environ  100  millions  d’ha dans le monde, soit 7% des terres agricoles mondiales contre moins de 2% il y a environ 10 ans. Plus de 80% des terres cultivées en agriculture de conservation se situent sur le continent américain, où on constate une augmentation très rapide de l’adoption de cette nouvelle technique dans les savanes du Brésil, d’Argentine et des pays voisins. La pratique de l’agriculture de conservation sur 25 millions d’ha au Brésil et 18 millions d’ha en Argentine explique en partie la compétitivité des agricultures de ces pays au niveau mondial. Comme l’Europe, l’Afrique  est  largement  en  retard  par  rapport  à  l’Amérique  en  ce  qui  concerne  l’adoption  de  l’agriculture  de conservation. L’essentiel des superficies cultivées en agriculture de conservation que l’on y trouve se situent en Afrique du Sud, avec plus de 300.000 ha.
Le relativement faible taux d’adoption de l’agriculture de conservation en Afrique s’explique par l’existence sur ce continent de nombreuses contraintes. Tout d’abord, la mauvaise adaptation de l’agriculture de conservation aux zones à faible niveau de pluviosité à cause de la concurrence qui existe dans ces régions entre les hommes, les cultures et les animaux pour l’utilisation des faibles quantités de biomasse produites pendant la courte saison des pluies. Deux autres contraintes importantes concernent l’insécurité foncière et l’existence de servitudes collectives,  comme  le  droit  de  vaine  pâture  et  la  pratique  des  assolements  réglés,  qui  caractérisent  encore une large part des systèmes de production agricole traditionnels d’Afrique. Ces deux contraintes compliquent fortement la mise en place des plantes de couverture susceptibles de produire la biomasse indispensable à la protection du sol. De plus, la pratique de l’agriculture de conservation ne se traduit pas toujours par une diminution de la charge de travail des agriculteurs et il faut disposer d’intrants et d’outils adaptés pour tirer pleinement parti des avantages de ce nouveau mode de production. Enfin, les bénéfices attendus ne se concrétisent souvent qu’après au minimum un à deux ans, ce qui est souvent jugé trop long par les producteurs. La mise en œuvre simultanée de l’ensemble des changements sur lesquels repose l’agriculture de conservation est donc complexes car elle nécessite d’acquérir et de mettre en pratique beaucoup de nouvelles connaissances en même temps et d’aller à l’encontre de pratiques ancestrales en matière de gestion des ressources naturelles.La levée de ces nombreuses contraintes implique d’agir simultanément au niveau des techniques de production et du contexte socio-économique dans le lequel celles-ci vont être mises en œuvre. Au niveau technique, il est indispensable d’identifier les options qui conviennent le mieux à chaque contexte agro-écologique. Notamment en ce qui concerne l’identification des plantes de couverture les mieux adaptées et la production des semences de ces dernières. Il est également indispensable d’impliquer les agriculteurs sur le long terme dans la définition des problèmes à résoudre et la recherche de leurs solutions. Cette dynamique doit idéalement s’accompagner d’un  processus  d’apprentissage  participatif  permettant  aux  producteurs  de  bien  comprendre  les  principes d’action et l’intérêt des innovations proposées pour l’amélioration de leur situation. Au niveau du contexte social, des solutions doivent idéalement être cherchées localement en vue de changer les modalités d’accès à la terre. Ces solutions doivent impliquer l’établissement d’un large consensus à l’échelle des communautés villageoises en ce qui concerne la mise en œuvre des nouvelles règles de gestion du foncier et l’établissement d’instances d’arbitrage  reconnues  par  tous.  L’acquisition  d’intrants  et  d’équipements  adéquats  par  les  producteurs  et l’établissement de conditions plus favorables pour la vente d’une partie de leurs récoltes peuvent être facilitée par la création ou le renforcement de coopératives.

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